Incarner l'Italie
Ernest Hébert (1817-1908)
"Les Cervarolles"
entre 1856 et 1898
huile sur toile
inv. 742
À 22 ans, en 1840, Ernest Hébert remporte le grand prix de Rome. Soixante ans plus tard, il se souvient du jugement implacable de Jean-Auguste-Dominique Ingres (1780-1867), alors directeur de la Villa Médicis, sur son envoi de première année, un berger antique d'après le modèle vivant : "M. Ingres parut à ma porte en tenue de visite officielle […] Son impression me sembla bonne. […] Au lieu de sortir par où il était entré, il prit la porte de ma chambre, et, en l'ouvrant, il trouva, accrochée derrière, une étude d'un petit pifferaro, en chapeau pointu portant ombre sur ses yeux noirs, la bouche rouge, les joues pâles, et grelottant de fièvre dans son manteau couleur d'amadou. […]
"- C'est vous, monsieur, qui avez fait cela ? […] Et bien, ça, c'est très bien, " dit-il d'une voix forte ; et, se retournant vers le dessin [du berger] sur le mur : "Et ça, c'est mauvais !"
(Hébert, 1901, p. 267)
C'est ainsi que le maître révéla au jeune artiste que les paysans de la campagne de Rome pouvaient être un sujet. Leurs costumes colorés, leur type méditerranéen et leurs attitudes au travail en font des figures pittoresques, à même de séduire le public du Salon. Lors de l'un de ses voyages en Italie, Hébert se rend le village des Abruzzes de Cervara, pour être au plus près de ses modèles dont il fait de nombreuses études préparatoires (National Galleries Scotland, musée du Louvre). "Les Cervarolles" du musée Bonnat-Helleu est probablement une étude ou une réplique de plus petit format du tableau de 1856, exposé au Salon de 1859 (musée d'Orsay).
