Un Orient peut en cacher un autre...
Léon Bonnat (1833-1922)
"Étude pour « Cheiks de la Kaaba (Arabie Pétrée)"
vers 1872
huile sur toile
inv. CM 554
Lors de son voyage en Orient, Léon Bonnat peint relativement peu de figures. En revanche, les esquisses de paysage lui permettent de composer quelques scènes pour le Salon, dans une veine orientaliste explorée brièvement entre 1870 et 1876. C'est ainsi que les alentours d'Aqaba (Jordanie) impressionnent l'artiste et lui inspirent "Cheiks de la Kaaba (Arabie Pétrée)" (Saint-Pétersbourg, musée de l'Ermitage), exposé au Salon de 1872. La toile du musée Bonnat-Helleu, brossée d'une touche large extrêmement rapide et dans un format assez important, pourrait être une réflexion préparatoire à ce tableau plutôt qu'une étude sur le motif. Malgré le cadrage plus large de l'œuvre définitive, la composition générale en est assez proche : les figures sont réparties en deux groupes autour des cavaliers porteurs de lances. Les accents colorés rythment la succession des figures et la lumière structure les plans.
La comparaison avec l'arabe du musée des beaux-arts de Dijon, réalisé à Pétra et plus descriptif, laisse penser que l'étude de Bayonne a été composée en France. Une lettre, adressée par Bonnat à l'un de ses amis, éclaire son processus créatif : "Ayant vu mon tableau éclairé par un soleil couchant sur les sables de la mer Rouge, je ne puis guère […] songer à le peindre en pleine rue de Paris, et j'ai pensé à Saint-Jean [de Luz]. J'y aurai du sable ; vous me procurerez un homme, que j'habillerai d'une chemise rouge […], pour monter soit un de vos chevaux, soit un arabe de l'escadron des chasseurs d'Afrique de Bayonne […]. Je ferai poser le tout, de six à sept heures du soir[...] ; j'aurai des effets superbes ; il me sera facile ensuite d'adapter mes nouvelles études à celles que j'ai faites pendant mon voyage." (Lyon, musée des Beaux-Arts, 2010)